LA MALADIE D'ALZHEIMER

CARACTERISTIQUES CLINIQUES DE LA MALADIE

fotolia_41958820La maladie d'ALZHEIMER se caractérise cliniquement, dès le début et pour longtemps par la perte de la mémoire consciente des faits récents qui ne sont plus encodés et stockés par l'hippocampe : c'est l'amnésie antérograde.

Tout se passe comme si le patient ne pouvait plus "prendre appui" sur un passé récent qui se "dérobe" pour se projeter vers un avenir qui le motiverait. Plus de passé, plus d'avenir, plus de projets, plus de motivations, plus d'émotions : c'est l'apathie. La conscience est présente mais semble vide. L'arrêt de "l'encodage-stockage" agit comme un "arrêt sur image" : le flux spontané et continu de la pensée semble en panne. La petite "voix intérieure" semble éteinte.

Amnésie antérograde, apathie et vacuité de la conscience se conjuguent pour désespérer l'entourage et les patients et conduire au renoncement pour les uns et à l'isolement mortifère pour les autres. Et pourtant ... un trésor de souvenirs anciens persiste : c'est la mémoire rétrograde.

Malheureusement, ces souvenirs anciens sont difficilement accessibles à un rappel libre et volontaire. Toute remémoration volontaire du passé (rappel direct) aboutit rapidement à un sentiment d'échec et à sa conscience douloureuse. C'est donc à un mécanisme de récupération involontaire qu'il faut faire appel pour mobiliser cette mémoire des faits anciens. C'est sur ce principe que repose toute méthode de mnémothérapie et notamment la mnémothérapie musicale.

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AMNESIE ANTEROGRADE & REPRODUCTIBILITE

L'écoute volontaire d'une musique connue est toujours l'occasion d'un plaisir. Par contre, lorsque survient de façon imprévue et involontaire l'écoute d'une musique connue la sensation ressentie est celle d'une joie profonde et intense. L'imprévu joue le rôle de déclencheur, mais la joie ressentie ne peut pas être réitérée car une nouvelle écoute ne serait plus imprévue. En revanche, chez la personne Alzheimer, l'amnésie antérograde permet de répéter tous les jours la même sensation d'imprévu et donc la même joie pour une musique connue, imprévue, et indicée.

Ainsi la réminiscence imprévue crée les conditions de la joie. L'amnésie antérograde crée les conditions de la reproductibilité : une méthodologie et une étude scientifique sont désormais possibles. C'est sur cette base que l'on peut constituer des "play-lists" personnalisées et reproduire la joie de la réminiscence et de la reviviscence tous les jours chez une personne Alzheimer.

LES MEMOIRES

La mémoire est cette faculté que possède le cerveau de rassembler en un tout les innombrables phénomènes de notre existence et de les conserver : "on met en mémoire".

C'est à partir de cette trame que va pouvoir se constituer la conscience puis émerger la conscience de soi. Le cerveau modifie constamment sa structure pour mieux refléter les expériences rencontrées. On distingue plusieurs sortes de mémoires dont la diversité se retrouve aussi bien à l'étape sociale et psychologique qu'aux étapes plus profondes, anatomique, cellulaire et moléculaire. La mémoire est un exemple parfait de l'unité du cerveau à tous les niveaux.

On distingue :

La mémoire sensorielle

C’est la mémoire automatique provenant de nos capacités sensorielles qui s'évanouit en moins d'une seconde.

 

La mémoire à court terme

Elle dépend de l'attention portée aux éléments de la mémoire sensorielle. Elle permet de garder une information pendant moins d'une minute et de pouvoir la restituer dans ce délai.

 

La mémoire de travail

C'est une extension du concept de mémoire à court terme. Elle permet d'effectuer des traitements cognitifs sur des éléments qui sont temporairement conservés pour être comparés, associés, traités. Il s'agit d'un processus faisant appel au raisonnement , à la lecture, l'écriture, le calcul.

 

La mémoire à long terme

Elle comprend la mémoire des faits récents dont le souvenir est encore fragile et la mémoire des faits anciens dont le souvenir est consolidé. Elle peut être schématisée comme la succession de 4 processus de base : l'encodage, le stockage, la consolidation et la restitution des informations. Dans cette mémoire à long terme le stockage et la consolidation imposent de façon spécifique l'entrée en action des gènes qui vont permettre la fabrication de nouvelles synapses avec toutes les protéines spécifiques qui les composent.

Le cortex para-hippocampique et l'hippocampe jouent un rôle fondamental dans le stockage, la consolidation et le rappel volontaire des souvenirs.

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AMNESIE ANTEROGRADE ET MNEMOTHERAPIE

L'écoute volontaire d'une musique connue est toujours l'occasion d'un plaisir. Par contre, lorsque survient de façon imprévue et involontaire l'écoute d'une musique connue la sensation ressentie est celle d'une joie profonde et intense. L'imprévu joue le rôle de déclencheur, mais la joie ressentie ne peut pas être réitérée car une nouvelle écoute ne serait plus imprévue. En revanche, chez la personne Alzheimer, l'amnésie antérograde permet de répéter tous les jours la même sensation d'imprévu et donc la même joie pour une musique connue, imprévue, et indicée.

Ainsi la réminiscence imprévue crée les conditions de la joie. L'amnésie antérograde crée les conditions de la reproductibilité : une méthodologie et une étude scientifique sont désormais possibles. C'est sur cette base que l'on peut constituer des "play-lists" personnalisées et reproduire la joie de la réminiscence et de la reviviscence tous les jours chez une personne Alzheimer.

LA MUSIQUE ET LE CERVEAU

LE CERVEAU MUSICIEN

-          Les voies de l’audition
-          L’écoute
-          La hauteur des sons
-          La perception modulaire
-          Musique et plasticité cérébrale
-          Amusie
-          Emotion musicale et universalité
-          Musique et thérapie

1/ Les voies de l’audition :

La vibration d'un instrument de musique ou d'une corde vocale entraine la formation d'une onde mécanique qui est propagée dans le milieu aérien.
Les ondes mécaniques interceptées par le pavillon de l’oreille empruntent le conduit auditif externe et viennent frapper le tympan qui transmet alors cette onde aux osselets dans l’oreille moyenne.
La vibration des osselets chargés d’atténuer les ondes trop fortes se répercute dans l’endolymphe, liquide qui baigne l’oreille interne.
L'onde mécanique, transformée en onde de pression, pénètre alors dans la cochlée où il fait vibrer la membrane basilaire.
La taille et la rigidité des fibres de cette membrane varient :
Près de l’entrée de la cochlée elles sont courtes et rigides sensibles aux hautes fréquences ; au sommet elles sont longues et souples, entrant en résonnance avec les basses fréquences.
La vibration de la membrane basilaire se transmet aux cellules ciliées dont les cils sont pris dans la membrana tectoria.
La déformation de ceux-ci est enregistrée par les terminaisons nerveuses enroulées sur leur base.
L’onde de pression est ainsi transformée en influx nerveux.
Le nerf cochléaire ou nerf auditif transmet ces informations vers le cortex auditif lui-même en contact avec de nombreuses régions du cerveau ; entre le nerf cochléaire et le cortex auditif, de nombreux relais synaptiques vont permettre de commencer le traitement des informations notamment d’identifier la direction d’où vient l'onde par le calcul de la différence de temps parcouru entre deux ondes perçues.

Les relais synaptiques qui vont conduire au cortex sont les suivants :

Nerf auditif     →    noyau cochléaire dorsal et ventral du bulbe ainsi que le noyau de l’olive supérieure du bulbe    →     colliculus  inférieur de la protubérance      →    Corps genouillé médian du thalamus     →     cortex auditif.

C'est au niveau du cortex auditif que l'influx nerveux devient un son.
Le cortex auditif est représenté par le sillon supérieur du lobe temporal droit et gauche. Chaque aire auditive reçoit des informations des deux oreilles.
L’aire auditive gauche assure en général une analyse grossière de la hauteur des sons tandis que l’aire auditive droite en assure une analyse fine.
La topographie du cortex auditif est infiniment plus complexe, les fréquences spécifiquement reçues par les neurones déterminent une carte tonotopique, et par ailleurs il faut distinguer l’aire auditive primaire qui va analyser la qualité d’un son et l’aire auditive secondaire ou associative qui va en déterminer la nature.
Ondes et influx nerveux sont des phénomènes scientifiquement étudiés.Le son est une création corticale réalisant un vécu phénoménologique qui ne se prouve pas mais s'éprouve.

2/ L’écoute :

Une classification des troubles de l’écoute est confrontée au fait que les aires attribuées aux taches de reconnaissance musicale varient beaucoup d’un individu à l’autre. Le chercheur Isabelle PERETZ de l’Université de Montréal a décrit des différences entre une écoute analytique et une écoute globale.
Les défauts de l’écoute analytique correspondent à des lésions de l’hémisphère gauche : les personnes atteintes distinguent mal la modification de quelques notes dans une mélodie.
Au contraire, les défauts de l’écoute globale sont dus à des lésions de l’hémisphère droit : c’est la reconnaissance de la ligne mélodique qui est perturbée.
L’hémisphère droit traite la structure d’ensemble de la musique tandis que le gauche en réalise une analyse plus fine.

3/ La hauteur des sons :

L’analyse de la hauteur des sons chez un auditeur sans expérience musicale particulière active le lobe frontal droit postérieur  ( gyrus cingulaire antérieur dont on sait depuis peu le rôle dans l’attentivité) et le sillon du lobe temporal :
La région frontale détecte la différence de hauteur des sons et la région temporale compare les sons entendus avec les sons retenus dans la mémoire de travail.
Contrairement aux amateurs, les musiciens professionnels présentent une activité accrue de l’hémisphère gauche lors de l’analyse de la hauteur des notes ou de la perception d’accords.
De même la perception des fréquence  rythmiques par un professionnel active des régions dites pré motrices dans les aires cérébrales servant à la préparation mentale des mouvements.

4/ La perception modulaire :

La complexité de l’analyse musicale amène les chercheurs de l’université de Lille et de Caen ( F. EUSTACHE) ( S. SAMSON ) (H. PLATEL) à proposer une conception «  modulaire »   de la perception auditive. Celle ci serait faite de rouages qui travaillent de façon plus ou moins indépendante,  chaque aspect de la musique peut être latéralisé différemment dans les hémisphères cérébraux. Ces modules seraient constitués de groupes de neurones réalisant de façon distincte le traitement du langage et celui de la musique et à l’intérieur de la musique, le traitement de ces différents aspects : rythme, mélodie et timbre.

5/ Musique et plasticité cérébrale :

Les modifications de la topologie cérébrale auditive sont à la fois importantes et rapides en fonction de l’écoute et de la pratique musicale.
L’activité des aires cérébrales de l’écoute et l’activité des aires contrôlant le mouvement des mains commence à se modifier au bout de 20 minutes de pratique.
Au bout de 3 semaines d’entrainement la simple écoute d’une mélodie suffit à activer les aires sensorio motrices alors que les participants ne bougent absolument pas le bout des doigts. Inversement les zones de l’écoute s’activent quand les participants appuient sur des touches muettes.
Ceci montre que le cerveau a été modifié par l’entrainement au point que les sujets présentent à la fin de l’expérience des caractéristiques d’activation proches de celles des pianistes professionnels chez qui les zones mobilisées par l’écoute ou par le mouvement des doigts se recouvrent totalement.

6/ Amusie :

Dans les troubles de la perception auditive il faut distinguer 3 grands syndromes : l’agnosie auditive, la surdité verbale pure et l’amusie.
Dans l’agnosie, le malade n’identifie pas les bruits de son environnement alors qu’il déclare entendre des sons ; il ne distingue pas la sonnerie d’un téléphone d’un verre brisé ou le bruit d’un moteur d’un claquement de porte.
Il peut perdre la faculté de percevoir la musique c'est-à-dire qu’il a conscience d’entendre des sons mais l’organisation des rythmes, la hauteur des notes et la constitution d’une mélodie lui restent inaccessibles.
La surdité verbale pure ou aphasie de Wernicke produit des perturbations spécifiques de la compréhension du langage. La dissociation compréhension du langage et compréhension musicale peut être complète : c’est le cas du musicien russe CHEBALINE qui ne pouvait plus s’exprimer ni comprendre le langage mais pouvait écrire une symphonie de grande qualité.
De même cet aveugle de naissance , qui à la suite d’une surdité verbale ne pouvait plus lire les textes en braille mais pouvait jouer les partitions écrites en braille.
L’amusie touche spécifiquement la perception de la musique. Tel est le cas d’une jeune femme étudiée par I. PERETZ : à la suite de lésions étendues des deux lobes temporaux elle était devenue incapable de reconnaître des mélodies, elle avait des difficultés à évaluer la hauteur des notes et ne reconnaissait aucun extrait musical à moins que ces airs ne fussent accompagnés de paroles.
Après 7 ans de suivi elle ne présentait pratiquement plus de perturbations concernant la hauteur des notes mais n’identifiait une mélodie que si elle était chantée.
Ces observations suggèrent l’existence de mémoire à long terme propre à la musique.

7/ Emotion musicale et universalité :

L’ensemble des études actuelles permet en conclusion de souligner deux points, tout d’abord l’universalité de l’écoute musicale : tous les paramètres de l’écoute musicale sont identiques chez les êtres humains.  La pratique musicale entraine les mêmes conséquences pour tous, à savoir une modification corticale répondant à la décomposition musicale : auditive, motrice et symbolique.
Par ailleurs le rôle de l’émotion dans l’écoute musicale est fondamental ; on a pu montrer que les états émotionnels modulent l’activité et la structure des réseaux de neurones.
Des zones du cerveau (frontale et temporale gauches) s’activent préférentiellement lorsqu’il y a plaisir musical ; d’autres zones (symétrique mais droite) s’activent lorsque la musique déplait.
8/ Musique et thérapie :
Les liens privilégiés entre musique et émotion ainsi que les particularités propres à la perception musicale ont suggéré depuis longtemps que l’activité musicale pouvait être envisagée sous un jour thérapeutique.
On peut distinguer deux grands types d’action : la musicothérapie passive et la musicothérapie active.
La première correspond généralement à l’écoute orientée de différents types de musique. Les objectifs visés sont la relaxation et la détente ou au contraire une stimulation physiologique.
La seconde, implique une participation à la production musicale. Les objectifs visés sont la mobilisation des ressources cognitives et physiques des patients et la restauration de la communication.

Une troisième voie de recherche qui fait l’objet de notre étude personnelle est l’utilisation de la musique non pas pour ses pouvoirs mélodiques ou rythmiques apaisants ou stimulants mais pour son pouvoir d’indiçage permettant de faire renaitre des épisodes autobiographiques oubliés et par la même de renouer une communication et de constituer un dialogue avec les patients atteints de maladie d’Alzheimer.
L’objectif visé étant alors une restructuration identitaire et son corolaire :
un bonheur retrouvé.
Il s’agit donc plus d’une véritable mnémothérapie que d’une musicothérapie au sens habituel du terme.
La mnémothérapie est une thérapie par la mémoire et non pas de la mémoire.
Au total les travaux actuels de neurosciences sur la perception musicale confirment l'extrême complexité de celle-ci mais souligne son caractère universel, son intensité émotionnelle et sa propension au bonheur.
 

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